Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
6 juin 2016 1 06 /06 /juin /2016 19:34
Gros coup de coeur : Haïku, de Eric Calatraba...

~~Je venais de refermer prématurément un polar dont je tairai le titre et qui m’était tombé des mains et j’en ai ouvert un autre qui, lui, m’a littéralement « collé aux mains ». Je l’ai dévoré en à peine plus d’une journée. Il s’agit de l’excellent Haïku de Eric Calatraba. Un polar passionnant qui vous entraîne à cent à l’heure entre les arts martiaux, l’opéra et les grosses cylindrées, au cœur d’une enquête qui vous happe tout entier et vous captive jusqu’à la dernière page. Raphaël et Ivan, les deux principaux protagonistes, ont beaucoup de points communs mais ce sont deux hommes que, pourtant, tout sépare. L’un est un policier, l’autre est un tueur dont les meurtres ritualisés sont annoncés par des poèmes dans la plus pure tradition japonaise : des haïkus. Les deux hommes qui ont suivi des chemins parallèles sont forcément appelés à se rencontrer et sans aucun doute à s’affronter. Il n’y a pas de temps morts dans ce polar virevoltant et bien écrit et le dénouement est à la hauteur d’une intrigue prenante à souhait. Un polar à découvrir pour celles et ceux qui aiment le mélange du suspense et de l’action. Les amateurs de musique classique et d’arts martiaux se régaleront.

Haïku, de Eric Calatraba, Editions de Londres, 336 pages.

Partager cet article
Repost0
1 juin 2016 3 01 /06 /juin /2016 13:24
Gros coup de coeur : L'équarrisseur, de Bernard Vitiello...

~~« L’équarrisseur » est une novella, c’est-à-dire un roman noir, court, 156 pages, dont le dénouement s’ouvre sur une suite. La règle du jeu, rappelée au début du livre, consiste à mettre en scène, dans chaque opus de la série, les mêmes personnages, déclinés chaque fois selon l’envie des auteurs qui se succèdent dans cet exercice. Car ce roman s’inscrit dans une série qui, à bien des égards, rappelle celle du Poulpe. C’est aussi bien sûr un polar, avec une intrigue policière. Cette fois, c’est Bernard Vitiello qui s’y colle, avec la maestria qu’on lui connaît, sa verve, et son style percutant. Il y a du Léo Malet dans cette novella, une gouaille, un humour que l’on savoure du début jusqu’à la fin. Il y a aussi de l’action et du suspense et ce court roman se laisse dévorer en un rien de temps. Bernard Vitiello est un virtuose du noir. Dans un autre registre, j’avais savouré à sa juste valeur « Angel rock » du même auteur. J’ai aussi beaucoup aimé « l’équarrisseur » que je recommande chaudement à tous les amateurs de romans noirs teintés d’humour et chargés d’action et de suspense. Précipitez-vous, c’est du très bon.

L’équarrisseur, de Bernard Vitiello, Editions du Horsain ( version papier ) et Ska ( version numérique ), novembre 2013, 156 pages, 10 €.

Partager cet article
Repost0
30 mai 2016 1 30 /05 /mai /2016 08:21
Très belle chronique d'une autre blogueuse...

Je rentre du salon du polar du Lavandou et j'ai le plaisir de découvrir l'excellente chronique que m'a consacrée Zen Lilou sur son blog et qu'elle a également publiée sur sa page Facebook. Un grand merci à cette lectrice fidèle qui vit à l'autre bout de la France et que j'aurai le plaisir de rencontrer en novembre à l'occasion de mes dédicaces à Sedan et à Charleville-Mézières.

~~C’est le 4e polar que je lis de Jean-Michel Lecocq. Je continue ainsi ma découverte totale de sa production littéraire car il est indéniable que j’aime son écriture et je veux tout lire…. Découvert par hasard, grâce à un ami commun, je remercie encore ici Jean-François pour ce judicieux conseil de lire cet auteur. Portrait-robot est un excellent polar qui se déroule sur deux régions, le Var aux environs de Draguignan et les Ardennes, terres natales de l’auteur et mon lieu de vie actuel, et sur deux périodes, une affaire de meurtres qui se déroule de nos jours dans le Var qui fait résonnance à une histoire plus ancienne qui s’est déroulée dans les Ardennes, une quinzaine d’années plus tôt. On alterne entre ces deux régions et surtout ces deux affaires criminelles qui dans les Ardennes était le fait d’une jeune fille, Juliette Laffont, qui avait tué ses deux parents et qui après un séjour en hôpital psychiatrique (Belair, ça dira des choses aux Ardennais !) s’en est enfui et a tué plusieurs hommes (une balle entre les deux yeux) lors de sa fugue avant de se suicider. L’intrigue est bien menée et tricotée tellement serrée que j’ai cru à un moment que l’auteur s’était emmêlé les « pinceaux » entre deux personnages… et bien non, lol, tout va bien, l’auteur reste bien le maître de l’histoire et du suspens…. Perso, il m’est agréable de reconnaître dans ma lecture des endroits connus… J’aime beaucoup le personnage du flic Tragos, ses relations conflictuelles avec son supérieur, les liens avec son équipe et le binôme assez jubilatoire qu’il fait ici avec le gendarme Maccari. J’ai beaucoup apprécié également le gendarme ardennais Delmas, à la retraite, qui est plein de malice, bon vivant et très perspicace. Bref, un très bon polar, agréable à lire et qui fait passer un excellent moment…. A découvrir !

https://www.facebook.com/MaPassionLesLivres/?fref=nf

Partager cet article
Repost0
23 mai 2016 1 23 /05 /mai /2016 16:11
Gros coup de coeur : Train d'enfer, de Jérémy Bouquin...

~~Les amateurs de thrillers appellent ce genre de livre un « page turner », signifiant ainsi le côté passionnant du roman qu’on dévore d’une traite. Et c’est bien le cas avec cet excellent thriller qui fonce à cent à l’heure sur les terres de Touraine, sur les pas d’un détective privé, Abel Jackal, qui travaille pour le compte du patron d’une start up spécialisée dans la protection des « repentis » ou encore des programmes de protection de témoins. Difficile d’aller plus loin sans défrayer l’intérêt d’une intrigue fort bien construite, ni sans déflorer un suspense savamment entretenu tout au long des 206 pages de cette histoire passionnante à souhait. De l'action, du rythme. Et un dénouement totalement inattendu. Encore une belle réussite de la collection Zones noires des éditions Wartberg à découvrir absolument.

Train d’enfer, de Jérémy Bouquin, Editions Wartberg, Coll. Zones noires, 2015, 206 pages, 11 € 90.

Partager cet article
Repost0
23 mai 2016 1 23 /05 /mai /2016 09:03
Gros coup de coeur : La fille au 22, de Anna-Véronique El Baze...

~~Ce thriller a des airs de novela. Court mais dense, il met en scène une jeune femme, Léa, qui s’ennuie et qui, prenant en grippe les hommes qui la séduisent, s’érige en tueuse et décide de les éliminer un par un. Il est vrai qu’elle a un beau pédigrée : elle est la fille d’un truand qui lui a légué un pistolet de calibre 22 qui va devenir son compagnon de route. Jusqu’au jour où son chemin croise celui d’un séduisant officier de police qui, précisément, enquête sur la série de meurtres qui ensanglante Paris. Comment Léa va-t-elle gérer cette coïncidence ? Patrick, le policier, subira-t-il le même sort que les autres ? Ou bien va-t-il réussir à démasquer la meurtrière qui a dû laisser des indices derrière elle ? C’est tout l’intérêt de ce thriller captivant, bien écrit et qui entretient le suspense jusqu’au bout. A découvrir absolument.

La fille au 22, de Anna-Véronique El Baze, Editions du Cherche-Midi, mai 2016, 183 pages, 16 €.

Partager cet article
Repost0
22 mai 2016 7 22 /05 /mai /2016 10:40

~~« Les gravats de la rade » est une nouvelle pépite de la collection Zones noires. Dans cet opus, Marek Corbel nous entraîne en Bretagne, dans la ville de Brest, sur les traces des fantômes de la seconde guerre mondiale, ceux des militants trotzkistes confrontés à un double adversaire : les communistes staliniens et la Gestapo. Et ce passé revient à la surface sous la forme de deux morts : celui de la riche propriétaire d’une entreprise de conserverie et celui d’un ancien activiste d’extrême-gauche retrouvés tous les deux tués par la même arme, un vieux modèle datant de la seconde guerre. Faisant alterner selon une habile orchestration ces deux récits, Marek Corbel nous entraîne dans un suspense prenant, au fil d’une intrigue passionnante. L’écriture est talentueuse. Il faut absolument découvrir ce polar pour passer quelques heures magiques.

Les gravats de la rade, de Marek Corbel, Editions Wartberg, Coll. Zones noires, 2015, 206 pages, 11 € 90.

Partager cet article
Repost0
18 mai 2016 3 18 /05 /mai /2016 19:37
Coup de coeur : Mission Malona, de Patricia Rappeneau...

C'est bien un thriller que ce "Mission Malona" qui met en scène Nathan Malocène, détective privé à Dijon. Mais ce privé n'est pas n'importe qui. Ancien d'Afghanistan, c'est un homme d'action qui possède de solides relations dans le milieu du renseignement et des agents des forces spéciales. Il va en avoir besoin le jour où son petit neveu est enlevé. Pour le retrouver, il va devoir faire appel à toutes ces ressources et payer de sa personne. L'affaire va bien au-delà d'un simple enlèvement et met en jeu un arrière-plan familial, écheveau complexe qu'il va tenter de démêler. Menée tambour battant et de façon parfois musclée, cette enquête est prenante et bien écrite. jusqu'au bout, on s'attache au personnage de ce détective hors normes qui finira bien entendu par tirer au clair une affaire pourtant complexe. J'ai découvert avec plaisir cet opus qui met en œuvre un personnage récurrent que je retrouverai volontiers dans de nouvelles aventures. Un bon thriller né du talent de Patricia Rappeneau, une auteure à suivre.

Mission Malona, de Patricia Rappeneau, Editions Ex-Aequo, septembre 2014, 165 pages, 15 €.

Partager cet article
Repost0
18 mai 2016 3 18 /05 /mai /2016 08:11
Un extrait de "24", thriller historique...

~~ Chaque matin, en arrivant dans son église, Martin entreprenait d’abord d’allumer les poêles, installés dans le chœur et de chaque côté de la nef, à raison d’un tous les vingt mètres. Ce matin là, plus que tout autre jour, cette priorité s’imposait. Le froid avait dû être plus intense que les nuits précédentes. Les vitraux étaient recouverts de givre. Malgré la peau de mouton qui lui ceignait les reins et recouvrait ses épaules, Martin grelottait. Il se dit que les quelques bûches entassées près de chaque poêle ne suffiraient pas à entretenir, tout le temps de l’office, la chaleur souhaitée, d’autant plus qu’il faudrait maintenir des braises pour pouvoir relancer le feu juste avant les vêpres. En conséquence, il se dirigea vers la réserve de bois à laquelle on accédait par la sacristie. La porte était ouverte, ce qui surprit et contraria Martin. Car Martin tenait à ce que tout fût en ordre et à ce que rien ne dérogeât, de quelque façon que ce fût, à des usages maintenus inchangés depuis des décennies. Une seule fois en quinze ans, cet ordre immuable avait été violé, précisément en août de l’année précédente, le matin où il avait trouvé la porte de l’église ouverte. En s’avançant dans l’allée centrale, il avait aperçu un corps sans vie, allongé à même le sol, la gorge tranchée. L’homme, un musicien d’une soixantaine d’années, était venu se faire assassiner là, pendant la nuit, Dieu seul savait pourquoi. Et encore ! La victime appartenait à la maison d’Estouteville dont l’hôtel particulier se trouvait sous les remparts, Vieille rue du Temple, à l’autre bout de Paris. Tout le monde se demanda ce qu’il était venu faire là et qui avait pu estourbir cet homme apparemment sans histoire. Au terme d’une enquête bâclée, la police épiscopale avait conclu à un crime de rôdeur, ce qui, compte-tenu de la canaille dont Paris regorgeait, plaçait les autorités devant une mission impossible, malgré la qualité et le zèle de leurs informateurs. La prévôté, jalouse de ses prérogatives, avait bien mené elle aussi son enquête mais avait très vite renoncé à trouver le coupable. En poussant la porte de la réserve à bois, Martin eut un pressentiment, confirmé par la résistance du panneau à sa poussée. Quelque chose bloquait la porte et il dut s’employer de toutes ses forces pour parvenir à se frayer un passage suffisant dans l’entrebâillement. - Palsambleu ! Sainte-mère, priez pour moi ! s’exclama-t-il, en se signant. Dans le rai de lumière que sa torche projetait par l’ouverture de la porte, Martin pouvait voir nettement un corps recroquevillé sous lequel s’était formée une tâche sombre qu’il identifia très vite comme du sang. A voir sa mise, on devinait que l’homme n’était pas un gueux. Le manteau, sans être neuf, était encore beau et de bonne facture, tout de velours noir, ourlé, au col et en bas, d’une garniture de taffetas gris. En se penchant sur le corps sans vie, Martin devina un vieillard dont le visage blême s’était figé dans une expression de souffrance. Son bonnet avait glissé, laissant voir sa tignasse blanche, éparse, dont les extrémités étaient collées par le sang séché. Osant un geste pour s’assurer que l’homme était bien mort, Martin sentit, au travers de l’étoffe, la rigidité d’un corps que la mort avait dû frapper depuis de longues heures déjà. Sans doute la veille. Il eut une réaction de recul. Puis, surmontant sa frayeur, il revint au cadavre. En approchant sa torche, il découvrit l’endroit où l’arme avait pénétré la victime. Une large déchirure entaillait le manteau, en bas du dos. D’une main tremblante, il souleva l’un des pans du vêtement. Il avait vu juste. Comme cela avait été le cas six mois plus tôt, la bourse en cuir, sur laquelle dansaient les reflets de la flamme vacillante, était rebondie comme un sein de garce. Il se retourna, promena sa torche tout autour pour s’assurer qu’il était bien seul et ouvrit la bourse, avec, dans le regard, le même mélange d’inquiétude et de cupidité que l’été précédent. Il ne prit pas le soin de compter les pièces en or qu’il bourra dans les poches de ses chausses. Il devait y avoir dans les mille livres. Comme six mois auparavant…. Puis, il monta dans le clocher, là où il savait trouver une cachette sûre. Il reviendrait le lendemain pour récupérer son butin. Comme six mois plus tôt…. Certes, Martin était un bon bedeau et même, sans doute, un bon chrétien mais cela n’y faisait rien. Cet homme-là, comme son compère trouvé au même endroit en août de l’année précédente, n’avait plus besoin de cet argent tandis que lui, Martin, savait à quoi l’employer. Des gages qui suffisaient à peine à le nourrir, une femme malade, un galetas pour tout logement, rue de la Serpente, et un fils disparu à dix-huit ans sans laisser d’adresse faisaient de son existence une longue et douloureuse pénitence. Avec cet argent, Martin savait qu’il pourrait quitter Paris pour trouver ailleurs une vie plus douce. Acheter un lopin de terre quelque part en Bretagne, là où avaient vécu ses ancêtres et, qui sait, voir revenir un jour le fils perdu. Lorsqu’il eut mis son butin en sécurité, le bedeau se décida à alerter le curé.

Partager cet article
Repost0
14 mai 2016 6 14 /05 /mai /2016 08:32
Gros coup de coeur : Poulets grillés de Sophie Hénaff...

~~La nouvelle Fred Vargas est-elle née sous la plume de Sophie hénaff ? Cette interrogation enthousiaste pourrait paraître excessive et, pourtant, il y a chez Sophie Hénaff quelque chose de l’ambiance qu’on trouve dans les romans de la mythique reine du polar français. Certes, les flics ne sont pas totalement les mêmes mais il y a une patte très proche de celle de Vargas. L’écriture, l’atmosphère, les petits travers des personnages, leur singularité, leur atypisme, le côté anecdotique des indices qui conduisent à la vérité, cet inventaire de figures à la Vandossler ou à la Retancourt, tout concourt à faire ce rapprochement. Et puis, il y a l’humour, présent de bout en bout qui ponctue une enquête elle-même atypique car conduite par une équipe de bras cassés, les rebus de la PJ, avec à leur tête une commissaire mise en quarantaine. Une brigade composée de ceux dont la hiérarchie a voulu se débarrasser et à laquelle elle a confié des dossiers classés sortis du fond des archives. Ces laissés pour compte de la maison poulaga vont s’ériger en une brigade improbable, une équipe de « caractères » composée de forts tempéraments, qui, par des voies détournées, hors de la procédure, va parvenir à élucider des affaires anciennes non élucidées. En prime, il y a du suspense. Voilà une belle découverte aux pas de laquelle je vais m’attacher. A découvrir absolument.

Poulets grillés, de Sophie Hénaff, Le livre de poche, mars 2016, 332 pages, 7 € 30.

Partager cet article
Repost0
12 mai 2016 4 12 /05 /mai /2016 10:45

En général, je poste des chroniques à propos des polars et thrillers de mes confrères. Pour une fois, je vais poster un chapitre de mon thriller historique "24". Un tueur en série fait couler le sang dans le Paris de 1572.

~~"Paris, le samedi 25 septembre 1572, 7 heures, le matin,

Cela faisait près de vingt ans que Jean Le Fleurinier exerçait son métier de fossoyeur. Durant ces années, il avait mis en terre près de la moitié des habitants du quartier des Halles. Le cimetière des Innocents était son terrain d’élection. Il y assurait la majeure partie de son office et y possédait une petite cabane où il remisait ses outils. En cette fin du mois de septembre, il pouvait enfin souffler un peu. Les massacres de la fin août l’avaient contraint à travailler deux fois plus longtemps que d’ordinaire. Ses journées de labeur démarraient avec le lever du soleil et ne s’arrêtaient qu’avec le couvre-feu, sous une chaleur accablante. Même si la plupart des corps, non identifiables, avaient été transportés hors des murs de la ville pour y être incinérés dans des fosses communes, de nombreuses familles avaient fait inhumer les leurs dans le cimetière de leur quartier. Celui des Innocents desservait les trois paroisses de Saint-Germain-L’Auxerrois, Saint-Eustache et Saint-Opportune, ce qui suffisait à en faire le plus grand de Paris. Jean Le Fleurinier n’avait pas chômé. Cela avait duré plusieurs semaines, tant la recherche des victimes était laborieuse et leur identification difficile. Il fallait attendre que les familles reconnaissent les corps avant d’enterrer les dépouilles qui empestaient, sous l’effet de la décomposition. Un quartenier, officiant au nom de la prévôté, l’accompagnait afin de s’assurer de la conformité des inhumations. Le plus souvent, le curé organisait une brève bénédiction et, à peine le trou rebouché, il fallait passer à l’enterrement suivant. En ce début de matinée, Jean Le Fleurinier se sentait bien. La fraîcheur matinale était supportable et le soleil, qui se levait derrière les toits de l’hôpital Sainte-Catherine, illuminait un ciel déjà bleu, promesse d’une belle journée de fin d’été. L’âme et le corps légers, il suivit la rue de la Chaussetterie puis celle de la Ferronnerie pour gagner l’entrée du cimetière située sur la Grand Rue Saint-Denis. Il n’avait que deux enterrements prévus au programme de cette journée, sans doute la plus calme depuis bien longtemps. Le premier étant fixé à dix heures, il allait avoir le temps de préparer ses outils et même de déguster tranquillement la collation que lui avait préparée son épouse. Sa cabane était située au fond du cimetière, adossée au mur qui donnait sur les Halles. Il y prit ses outils et se dirigea vers la fosse qu’il avait creusée la veille. Il aimait s’asseoir au bord du trou, les jambes pendant dans le vide, pour manger. Il l’avait fait des centaines de fois, lorsque le temps était favorable, comme ce matin. Le soleil avait envahi le cimetière et y répandait sa chaleur bienfaisante. Jean Le Fleurinier s’approcha de la fosse. Il posa sa besace sur le tas de terre encore fraîche qui surplombait le trou et engagea la jambe droite dans le vide. C’est alors que son regard tomba en arrêt sur l’homme allongé dans le fond, dont le visage portait la pâleur de la mort. Nicolas Chantemerle, le nouveau prévôt, resta longtemps immobile, devant la fosse. Campé derrière lui, le bailli Grandfontaine avait tenu à être présent. Le fossoyeur s’était placé en retrait, après avoir répondu du mieux qu’il avait pu à l’avalanche de questions du prévôt. Dans l’esprit de Chantemerle, comme dans celui du bailli, régnaient une effervescence et une confusion des plus grandes. Comment ce cadavre avait-il pu arriver là ? Qui l’y avait placé ? Qui était cet inconnu ?

- Ce n’est pas quelqu’un du quartier ! Il est âgé et je le connaîtrais.

Telle avait été la seule information fournie par le fossoyeur qui avait aidé les deux gardes prévôtaux à sortir le corps de la fosse.

- Examinez sa main droite ! demanda Grandfontaine.

Le prévôt s’exécuta. L’homme portait, au creux de la paume, un dessin représentant un signe tracé avec la pointe d’un couteau.

- De quoi s’agit-il ? s’exclama Chantemerle.

- De la lettre E, lui répondit le bailli avant de questionner le fossoyeur :

- Qui enterre-t-on dans ce secteur du cimetière ?

- Les paroissiens de Saint-Eustache, répondit Le Fleurinier. - E, c’est l’initiale de Saint-Eustache, soupira le bailli. Tous l’observaient, l’air interrogateur. Grandfontaine avait prit une mine grave. Sa voix ne l’était pas moins pour annoncer :

- Le scarificateur n’est pas mort. Il vient encore de frapper."

Voir les commentaires

Partager cet article
Repost0